Après ça d’Eliot Ruffel aux Editions de l’Olivier, un coup de cœur de Laurie

Nous sommes dans une ville côtière de Normandie. C’est l’été et deux adolescents de 17 ans ont deux mois à tuer devant eux.

Max, enfant de la région, est sur son territoire d’observation. Il traine derrière lui une réputation d’adolescent en colère et bagarreur. Léo, lui est fraichement arrivé avec sa mère pour la dernière année de lycée. Tous les deux se sont trouvés, partageant un même sentiment de révolte, une propension à rêver et surtout un caractère taiseux.

Pour fuir la canicule étouffante et l’afflux de touristes parisiens, les deux ados ont décidé de dormir le jour et de vivre la nuit. Chaque soir, ils arpentent les falaises avec un pack de bières bon marché jusqu’au bunker abandonné pour tromper leur ennui et repousser le jour. L’enchainement des canettes permet de baisser la garde et de libérer un peu les mots. Mais entre Max et Léo, il n’y a pas besoin de parler. Ils ont une complicité faite de jeux codés, de rires enfumés et d’une danse de gestes qui en dit souvent d’avantage : une canette tendue, un regard qui s’attarde sur des bleus...

Le silence est un accord tacite. Tous les deux partagent un héritage paternel marqué par la violence.
Tous deux attendent, observent l’horizon et se prêtent à rêver devant le passage des ferrys.
Rêver aux milles vies potentielles d’Yvan, le grand frère de Max qui est parti un jour sans donner de nouvelles après avoir fait un signalement pour protéger sa famille. Rêver d’une jeune fille du quartier intrigante. Tous deux sont à l’aube de devenir des hommes.
Et puis un jour, arrive ça… Il aura un avant et un après cet été.

Eliot Ruffel livre un très beau roman sur l’amitié adolescente. L’auteur dépeint avec beaucoup de justesse cette période de gaucherie, de pudeur où le langage passe par le corps quand les mots sont si durs à exprimer. Ce moment charnière entre la fin de l’enfance et l’entrée dans l’âge adulte, avec cette question : comment se construire, devenir un homme quand les repères masculins sont aussi défaillants ? Que faire de cette violence dont on hérite ?
Le roman est très visuel, on a l’impression d’un instantané, d’un polaroïd d’un été. (L’auteur vient de la photographie)
Après ça, c’est aussi lire un autre récit sur l’adolescence. Une jeunesse des provinces dont on parle moins, issue des classes populaires et qui souffre parfois d’un manque de perspectives. Eliot Ruffel nous immerge dans ces villes moyennes avec ses pavillons, son Buffalo Grill, son épicerie de nuit.
Un roman tendre qui nous bouleverse à mesure qu’avance le récit et qui nous frappe par la finesse de son écriture des émotions en creux. La beauté de cette amitié vous touchera au cœur.
Un auteur à suivre de près.

Le Vendredi 7 Mars, une rencontre vous est proposée avec l’écrivain Eliot Ruffel, et le photographe Cédric Calandraud. Ils évoqueront leurs travaux attachés à une vision des adolescents moins mise en avant par les médias (évoluant en zone rurales ou périurbaines). Cette rencontre sera suivie d’un vernissage de l’exposition photo et d’une dédicace de l’auteur.
Rencontre à 17h30 dans l’Auditorium